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Accompagner le changement : faire rimer raison et émotions

Ci-dessous, une interview de Cécil Schmitt, Président-Fondateur de Here & Next publiée sur le site de MicroMégas, notre partenaire sur nos activités de coaching.


Tout projet de transformation se heurte à des résistances qui peuvent parfois déchaîner les passions. Équilibrer les recours à la rationalité et à l’émotionnel des talents est alors un défi majeur pour les dirigeantes, dirigeants et managers.

Doit-on nécessairement arbitrer entre raison et émotions ? Point de vue de Cécil Schmitt, coach professionnel et partenaire de MicroMégas.



Construire les murs de la raison, ouvrir la porte aux émotions...


« Dans un projet de transformation, on doit faire appel à la raison et aux émotions en parallèle », commence Cécil Schmitt. La raison permet de prendre des décisions éclairées. « Elle est là pour donner le cadre. Et c’est ce cadre qui permet de construire les murs du projet, l’équipe, les rôles. Puis plus tard, de mesurer l’évolution de la transformation et ses résultats. Finalement, comme les 12 coups au théâtre, c’est le cadre qui lance le mouvement », explique-t-il. Et la raison est si essentielle pour établir un plan d’action clair et structuré, qu'il est rarement nécessaire de rappeler son importance en entreprise...

Ce qui est moins naturel, en revanche, c’est de laisser les émotions investir ce cadre. « C’est encore trop rarement un réflexe. Peu de personnes osent réellement exprimer ce qu’elles ressentent en entreprise. Beaucoup de gens de ma génération sont encore convaincus qu’ils doivent rester droits et forts, même dans les pires tempêtes », souligne le coach. Pourtant, ce sont bien les émotions qui influencent la manière dont chacun réagit aux évolutions, et affectent la motivation et l’engagement individuel et collectif. « Pouvoir mettre des mots dessus reste la meilleure manière, pour les managers et les entreprises, d’y répondre de façon appropriée », rappelle-t-il.


… puis trouver la bonne clé


Une fois convaincu-e qu’il est tout à fait rationnel d’ouvrir la porte à l’émotionnel, comment ouvrir cette porte ? « Le plus important avec les émotions dans un projet de transformation, c’est déjà de dire qu’elles sont permises », explique Cécil Schmitt. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut essayer les différentes clés qui permettront de déverrouiller la serrure. « Pour moi, c’est le corps qui fait résonner les émotions : quand il bouge, tout bouge et libère de l’énergie. Le théâtre est particulièrement intéressant en ce sens, car il propose des exercices qui permettent de prendre conscience de l’importance de ses propres ressentis, puis de les exprimer », illustre le coach, également comédien amateur.

Car si les émotions agréables (joie, curiosité, enthousiasme…) sont aujourd’hui acceptées, les émotions désagréables (trop souvent appelées “négatives” d’ailleurs) restent malvenues. Sans doute à tort. « Une fois que l’on parle d’une émotion désagréable, on la dépose, cela devient davantage un objet sur lequel on peut prendre du recul, que quelque chose qui vous submerge », confie le coach.


Ces émotions désagréables qui frappent à la fenêtre


Tous les invités n’arrivent pas avec un joli bouquet de fleurs et un gâteau appétissant pour le dessert. Accueillir les émotions, c’est accepter de toutes les faire entrer, même les plus désagréables. Des émotions, on peut en nommer une cinquantaine, mais les premières à s'inviter ce sont...

La peur. Dans un projet de conduite du changement, c’est avant tout la peur de l’inconnu qui s’exprime. « C’est d’ailleurs rarement le projet en tant que tel qui fait peur, mais plutôt sa propre place et de son rôle dans ce projet », traduit Cécil Schmitt.

La colère. Perte de contrôle, changement de culture, mauvaise communication… autant de problèmes générateurs de confusion. « La colère n’est souvent que la transformation d’une peur ou d’une incompréhension qui n’est pas prise en compte par l’organisation », observe-t-il.

Le découragement. « Elle est le fruit malheureux de la déconnexion entre ce que ressent la personne, l’histoire qu’elle se fait du changement, et sa place à l’intérieur », ajoute-t-il. Quand l’individu sait que le changement est nécessaire, mais qu’il n’a pas confiance dans son entreprise ou son leader pour le conduire de manière saine, le fatalisme frappe à la porte.

Car des émotions qui n’entrent pas par la porte savent très bien passer par la fenêtre. En l’occurrence, la fenêtre, ça peut être des jeux psychologiques : les individus naviguent entre les trois positions du “triangle dramatique de Karpman” que sont la victime, le persécuteur et le sauveur. Schématiquement, la victime se sent impuissante face au changement et se plaint de sa situation. Possiblement auprès d’un sauveur, qui cherche à maintenir le statu quo ou à minimiser les effets du changement. Tandis qu’un persécuteur critique le changement et exerce son pouvoir sur les autres.

Et c’est bien pour éviter ces postures néfastes qu’il est nécessaire de laisser les émotions s’exprimer. « Comprendre les émotions désagréables et les postures dans lesquelles elles poussent les individus nous aide à mieux décrypter les réactions des uns et des autres… puis à trouver des moyens de les aider à surmonter ces difficultés en adoptant une attitude plus positive et proactive face au changement », explique le coach.


Offrez le meilleur fauteuil à l'intelligence émotionnelle


Inviter les émotions, c’est bien. Les faire attendre dans le couloir, c’est dommage. Car leur offrir une place de choix peut aider les individus à surmonter leurs résistances en leur apprenant à identifier celles qui les empêchent de changer. « Un individu peut résister à changer une habitude simplement parce qu'il a peur de l'échec. Mais encore faut-il le savoir », illustre le coach.

Son observation rejoint la théorie de l’immunité au changement de Robert Kegan et Lisa Lahey, qui fait le constat que nous avons tous des « systèmes immunitaires psychologiques » conçus pour nous protéger de tout changement qui pourrait menacer notre identité ou notre sécurité. Ceux-ci sont constitués de croyances profondément ancrées car liées à notre développement en tant qu’adultes et souvent inconscientes sur qui nous sommes, sur ce que nous sommes capables de faire et sur le monde qui nous entoure.

Dénouer ces croyances peut alors être un travail de longue haleine, qui s’accompagne sur un temps long plutôt qu’il ne s’exécute de manière ponctuelle. Pour Cécil Schmitt, c’est une des raisons pour lesquelles il faut créer les rituels qui permettent de les exprimer de manière régulière. Il ne s’agit pas de lancer une invitation en l’air (« Bien sûr, passez nous voir la prochaine fois que vous êtes dans le coin ! ») mais bien de créer des rendez-vous aussi réguliers que les après-midi bridge d’un club de senior. « Il y a une véritable responsabilité des managers à prévoir l’expression de cette intelligence émotionnelle au sein de leurs équipes, et à savoir les faciliter en mettant de côté son propre agenda », rappelle-t-il.

En travaillant sur l’articulation entre raison et émotions, il espère créer le déclic. « Le coaching n’a pas pour finalité de changer le comportement en surface. Au contraire, c’est pour moi une manière d’accompagner les individus et les équipes sur les leviers de ces comportements pour qu’à terme ceux-ci évoluent en profondeur », explique-t-il.

Alors à la question « Peut-on conduire une transformation en se concentrant uniquement sur la raison ? », la réponse du coach est sans appel : « On peut, certainement… mais il faut s’accrocher ! Et je suis prêt à parier que cela ne mènerait nulle part. »


Vous partagez la réponse de Cécil ? Alors faisons rimer ensemble raison et émotions, au service de vos projets de transformation.


Propos recueillis par Marlène Moreira - Welcome to The Jungle

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